19th Nov. '12
Zinedine Zidane, Charles de Gaulle and Xavier Niel.
Qu’ont en commun ces trois personnages ? D’après ma collègue française Séverine Leloarne, à la tête de la section Management de l’École de Management de Grenoble, ils font partie des quelques leaders clef que n’importe qui en France connaît. Charles de Gaulle, pour son influence en tant que Général et homme d’État : Xavier Niel – entrepreneur remarquable et fondateur de Free, opérateur Internet rivalisant avec des géants tels qu’Orange ; et oui, en effet, Zidane entre également dans cette liste pour avoir étendu le champ des fans de football en France (femmes comprises).
Que signifie, alors, être un bon leader en France ?
Au contraire de ma collège Séverine, plutôt que Zidane, j’ajouterai probablement une autre figure du football français à la liste – Aimé Jacquet, entraîneur de l’équipe de France, celui qui l’a conduite à la victoire de la Coupe du monde en 1998. Pourquoi ont-ils gagné ? Michel Hidalgo, qui a été champion de France, déclare : « C’est le couronnement d’Aimé Jacquet, accompli contre vents et marées. Soixante millions de Français sont heureux. Ce qu’ils ont fait n’était rien moins qu’extraordinaire. » Ce n’est pas tant la supériorité technique qui les a menés à la victoire que leur fort esprit d’équipe ainsi que la cohésion entre les joueurs.
Le directeur général de l’entreprise française Amcad Engineering, Tony Gasseling, explique : « 90% de l’enjeu est constitué par l’équipe, les 10% restant représentent tout le reste : la technologie, les brevets, l’argent ». Évidemment, il s’agit aussi d’un problème de communication et de prise de décision efficaces : « En tant que créateur d’une start-up, j’engage des personnes très qualifiées et beaucoup d’entre elles ont un doctorat – vous ne pouvez vous contenter de dire à tout le monde que vous avez raison, que les choses seront comme cela et que tous n’ont qu’à vous suivre. Même lorsque le dernier mot vous revient, il est essentiel que chaque décision soit comprise. C’est cela, un bon leadership. » Être un chef ne relève véritablement pas du seul titre, et cela devient encore plus probant lorsque l’on dirige les jeunes générations.
Jeunes dirigeants et jeune génération
Dans la trentaine, Séverine souligne : ” Même si je m’adresse à ma génération, je n’aime pas être dirigée, je me rebelle contre l’autorité, mais si le leader est en mesure de m’inspirer et de confirmer sa réputation, ses compétences, j’accepte les règles – les étudiants réagissent de la même façon.” Une approche démocratique semble nécessaire, mais avec une touche d’autorité.
” L’inspiration est la clé, les étudiants veulent travailler pour des entreprises et des dirigeants qui offrent une vision et la promesse d’un rêve “, – explique Séverine. Dans plusieurs études récentes concernant les lieux où les étudiants aimeraient travailler, deux entreprises sont en tête – Google et Michelin. Elles sont très différentes – Michelin est une entreprise familiale où il faut respecter les règles et Google un lieu de créativité, où l’on peut consacrer son temps à générer des idées. Mais toutes deux conviennent à un naturel individualiste et offrent de belles perspectives de carrière aux âmes ambitieuses.
En même temps, alors que ce que la jeune génération recherche dans ses employeurs et chefs devient plus clair, on peut se demander s’ils sont désireux de les mettre en rapport avec leurs propres attentes. Séverine fait une remarque générale sur ses étudiants : ” Les jeunes gens veulent devenir des leaders pour l’argent et le prestige qu’offre une haute position, mais ils n’ont pas conscience de l’énorme responsabilité en terme de personnes et gestion du travail d’autrui que cela implique. ” Tout jeune dirigeant apprend rapidement que la responsabilité n’est pas seulement de gérer le budget et les finances, mais, de façon plus décisive : des personnes, avec leurs compétences, espoirs, rêves et aspirations.
Le message de base semble être : pour diriger, vous devez gagner en crédibilité, mais en même temps ne pas agir en porte-à-faux avec tous. « En tant que leader, je dois expliquer mon point de vue et le défendre, au lieu de l’imposer, sans quoi il ne manquera pas d’y avoir une rébellion silencieuse, les gens ne convertiront pas mes idées en action ou bien ils seront démotivés », – commente Tony à propos de la mentalité française.
Songeant à sa propre expérience, Tony ajoute : ” Si vous dirigez des cinquantenaires, vous devez employer une méthode de management classique : les tâches doivent être réparties depuis le sommet jusqu’aux personnes qui agiront en conséquence. Quand je travaille avec de jeunes gens, la mentalité est différente. La nouvelle génération est individualiste, si vous les voulez de votre côté, vous devez les écouter et prendre leurs considérations en compte. ”
Tony conclut alors, “un leader français doit avoir de grandes oreilles et une voix forte – pour bénéficier des contributions de votre équipe, mais aussi pour faire en sorte que vos idées soient entendues et comprises “.
Par le docteur Anna Nikina, s’entretenant avec Séverine Le Loarne, responsable du département Management et Technologie Stratégique à l’École de Management de Grenoble, et Tony Gasseling, directeur général d’Amcad Engineering, en France.
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